Le Haguenovien Loïc Weinhard a créé la microentreprise Agrotonome. Il commercialise des potagers-composteurs « autofertiles », qui permettent de jardiner tout en compostant, dans le même module.
« L’idée m’est venue il y a un an, en pleine crise sanitaire. Je voyais les gens agglutinés devant les supermarchés, j’étais choqué. J’ai ressenti le besoin d’aider les gens qui n’ont pas de jardins à être plus résilients. » À 33 ans, Loïc Weinhard a créé à Haguenau une microentreprise de « potagers-composteurs », qui permettent un jardinage complet en un seul module.
Si le maraîchage et l’horticulture sont séduisants, le compostage est associé dans l’imaginaire collectif aux déchets et odeurs nauséabondes. Pourtant, il est essentiel pour Loïc Weinhard. « 30 % de nos déchets sont organiques. On brûle de l’eau, c’est une hérésie ! L’idée est d’éviter la création de déchets, ainsi que leur transport. »
Mais même pour les plus motivés, composter sur son balcon est contraignant. « Quand j’habitais en appartement, je gardais mes déchets organiques dans un seau, que j’amenais une fois par semaine à Stundwiller, chez mes parents qui ont un jardin. Il existe bien des composteurs collectifs, au quartier Thurot à Haguenau, ou à Strasbourg, mais il faut encore se déplacer. »
Pour se démarquer, Loïc Weinhard a choisi de travailler l’inox
Ainsi, le jeune entrepreneur a imaginé un module en deux parties communicantes. Dans l’une, les déchets organiques déposés au-dessus se transforment en compost, à récupérer par une trappe en bas. Dans l’autre, les plantations absorbent les nutriments dont elles ont besoin et peuvent être alimentées par le dessus avec le compost. « Plus besoin d’engrais, mon système est autofertile. »
S’il est seul sur ce créneau dans le Grand Est, des produits approchants existent déjà ailleurs sur le marché. Pour se démarquer, Loïc Weinhard a choisi de travailler l’inox. « C’est une matière légère, robuste et durable. J’ai appris à maîtriser des logiciels trouvés sur internet pour dessiner mes plans. » Bientôt, le « Jardisy mini », un carré de 45 cm de côté, haut de 40 cm, était né sur ordinateur.
« En octobre, je me suis lancé dans une étude de marché. Tous les soirs, pendant un mois, j’ai fait du porte à porte. J’ai ciblé 200 personnes à Haguenau et Strasbourg qui avaient des balcons ou de petits terrains. Cela m’a permis de comprendre que le Jardisy mini ne répondait pas à tous les besoins. Pour certains, il est trop petit, pour d’autres, l’inox n’est pas esthétique. »
L’été dernier, un nouveau produit sort de l’imagination de l’entrepreneur : le « Jardisy boisy » est un carré potager en bois d’un mètre de long sur un mètre de large, haut de 42 cm, également doté d’un composteur en inox à l’intérieur. « J’ai choisi du douglas, qui n’a pas besoin d’être traité. Et les deux produits peuvent être doublés en taille en apposant un second module. »
Trois partenariats avec des entreprises alsaciennes
Pour donner corps à ses idées, Loïc Weinhard a démarché des entreprises alsaciennes et a décroché trois partenariats. L’Esat du Sonnenhof fabrique la partie bois, ce qui ajoute une dimension sociale au projet. Deux sous-traitants, des PME dans le domaine de la métallurgie, se partagent la partie inox : TSE Technique à Haguenau, et Alcyon Industries à Offendorf.
En décembre, la microentreprise Agrotonome est créée, la production du Jardisy boisy commence il y a un mois, et il est dorénavant vendu 269 euros TTC pièce. « J’ai transformé ma cave en atelier ! Avec mon père et mon beau-père, nous faisons nous-même la trappe et les encoches pour le couvercle, la dernière étape. Si l’entreprise grandit, il faudra trouver une autre solution bien sûr. »
Le Jardisy mini est quant à lui encore en cours de développement. Les tests, déjà, étaient plus longs. Comme il est en inox et hors-sol, son efficacité était plus incertaine. Mais le prototype installé dans son jardin il y a huit mois donne de bons résultats. De beaux choux, pourtant gourmands en nutriments, dépassent de la structure, et les vers s’y reproduisent allègrement.
« Avec Alcyon, nous travaillons encore à des prototypes du Jardisy mini. Il s’agit de trouver des solutions de production viables, notamment à cause de l’augmentation du prix des matières premières. Je voudrais le commercialiser en juin ou juillet. Je passerai peut-être par une levée de fonds, pour avoir une visibilité sur la production. »
Alors qu’il n’avait aucune connaissance entrepreneuriale en débutant, et continue en parallèle à travailler comme salarié dans les produits chimiques à Strasbourg, Loïc Weinhard a déjà de nouvelles idées en tête. « J’ai fabriqué un prototype de Jardisy boisy hors-sol. Dans les prochaines semaines, je vais le donner à 25 bêtatesteurs, et attendre leurs retours… »
UN ACCOMPAGNEMENT AU PLUS PRES DES CLIENTS
Les premiers clients arrivent, et Loïc Weinhard s’attelle à les accompagner. « Je vais faire des tutoriels pour leur apprendre à faire du compost. S’il est trop humide, il dégage une odeur et attire des nuisibles. Je peux aussi fournir de la sciure grossière venue de l’atelier de mon père, pour l’équilibrer et l’aérer. Mais pareil, si on grandit, je devrais trouver une solution moins artisanale. »
Les clients qui le demandent peuvent aussi être fournis en lombrics, qui accélèrent le compostage mais ne sont pas obligatoires, et même en compost pour démarrer une jardinière. « Je me suis associé à Sikle, qui collecte des biodéchets des professionnels à vélo-cargo, et les transforme en compost. »
Lien vers l’article sur le site des DNA